Article OPEX 360, avec le titre : Selon le général Mille, la disponibilité des avions de chasse a « globalement » progressé de 3% en 2023
Peut-être que certains pays de l’Otan, comme l’a récemment soutenu Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, restent très discrets au sujet de la disponibilité de leurs principaux équipements militaires… Mais ce n’est pas le cas des États-Unis, où de telles données sont publiées, notamment dans les rapports du Government Accountability Office [GAO, l’équivalent de la Cour des comptes]. C’est ainsi que, en septembre, on a appris que le « taux de capacité de mission » du chasseur-bombardier F-35 [c’est à dire le pourcentage de temps pendant lequel l’avion peut effectuer l’une de ses missions] s’était élevé à « seulement » 55% en mars 2023. Et cela vaut pour l’ensemble des avions en service au sein de l’US Air Force.
En France, il était possible d’obtenir de telles informations [sauf celles relatives à la dissuasion nucléaire] jusqu’en 2020. Cette année-là, le ministère des Armées décida de mettre les taux de disponibilité technique [DT] de ses équipements sous le boisseau. Cependant, grâce aux « bleus budgétaires » [c’est à dire les projets annuels de performance], on pouvait connaître les taux de disponibilité technique opérationnelle [DTO] qui, bien que moins précis, permettaient tout de même de se faire une idée des résultats des réformes menées dans le domaine du Maintien en condition opérationnelle [MCO]. Seulement, ces données, comme celles relatives à l’activité des forces, sont maintenant classées « diffusion restreinte France ». Au Parlement, les rapporteurs budgétaires pourront les obtenir… mais ils ne pourront pas les évoquer dans leurs avis budgétaires.
Cela étant, il apparaît que la réforme du MCO aéronautique, qui repose sur le concept de « contrat verticalisé », tarde à produire ses effets. En tout cas, c’est ce qu’a indiqué le général Stéphane Mille, le chef d’état-major de l’armée de l’Air [CEMAAE], lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le 5 octobre. Ainsi, selon le général Mille, la disponibilité de l’aviation de chasse a « globalement » augmenté de 3% en 2023. « Ce qui est déjà bien, objectivement », a-t-il dit.
Pour rappel, le MCO du Rafale est couvert par deux contrats « verticalisés » : RAVEL [Rafale Verticalisé], confié à Dassault Aviation en 2019, et BOLERO, notifié à Safran Aircraft Engines. Quant à celui du Mirage 2000, il a fait l’objet du contrat « Balzac », attribué en janvier 2022 à Dassault Aviation. Cette hausse de la disponibilité a permis « d’augmenter l’activité de chaque Rafale » et de compenser ainsi, partiellement, le prélèvement de 24 appareils dans l’inventaire de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE] pour honorer les commandes passées par la Grèce et la Croatie.
« En 2023, nous sommes passés de 250 heures par avion et par an, ce qui est le modèle sur lequel on construit les flottes aujourd’hui, à 290 heures par avion et an. Ça ne remplace pas la totalité de l’activité générée par les 24 Rafale prélevés. Pour autant, ça en compense une bonne partie », a expliqué le CEMAAE. Mais cela a exigé de revoir « tout le plan d’entretien » des appareils, avec des « rentrées en soutien industriel plus rapides que celles que l’on avait imaginées », a-t-il précisé.
Au passage, le général Mille a salué le travail des techniciens affectés dans les différents Escadrons de soutien technique aéronautique [ESTA]. « L’amélioration de la diponibilité, c’est certes le contrat et il faut des contrats pour avoir les pièces au moment où on a besoin, mais c’est aussi l’organisation du travail de nos escadrons. Nous avons des aviateurs qui passent des heures et des heures à dépanner nos avions. Les millions d’euros investis dans le MCO ne serviraient à rien sans eux », a-t-il dit.
Cependant, si la disponibilité de l’aviation de chasse progresse, ce n’est pas le cas de celle des autres flottes [transport, hélicoptères, drones]. « On est sur un plateau, voire une légère baisse », a admis le CEMAAE.
Pour lui, si la disponibilité « chasse » augmente, c’est parce que les marchés relatifs au MCO du Rafale et du Mirage 2000 ont été « les premiers à avoir été passés », ce qui fait qu’ils sont « plus matures ». Et s’il « ne faut pas être trop impatient », a-t-il poursuivi, les « délais de montée en puissance des marchés verticalisés » sont toutefois « trop longs ». « Si on pouvait, en claquant des doigts, basculer d’une logique à une autre, on y gagnerait énormément », a conclu le général Mille.