70 ans, l'heure du bilan : une vie en aviation en Afrique en photos

[Emikoussi]

70 ans, l'heure des bilans ...
En photos, je vais ici dérouler mes 70 ans d'aviation familiale Africaine. La plupart des photos sont des photos de famille, mais il y a aussi des photos glanées sur le net, surtout sur le site de Pierre Jarrige, que mes parents connaissaient (https://aviation-algerie.com/)

1/ Mon père :
Ca commence avant que je n'apparaisse sous ce ciel d'Afrique :
En 1943, à 18 ans, mon père Aurélien, (qui avait déjà commencé le planeur), suite au débarquement américain en Afrique du Nord, s'engage dans la France Libre, est sélectionné dans le cadre du "programme Arnold" pour suivre la formation de pilote aux USA (École de l'air de la France libre et CFPNA - Centre de Formation du Personnel Navigant en Amérique) où il part à bord d'un Liberty Ship vers les USA : c'est la guerre, la traversée dure jusqu'à 25 jours avec escorte navale, interdiction de fumer à l'extérieur du navire pour éviter d'être repéré par un sous-marin Allemand. Il subit ensuite tous les tests qui le dirigent finalement en tant que cadet pilote de chasse : formation sur PT17, P40, T6 et il terminera sur P47. Il sera chef d'escadrille à 19 ans.
(Il sera nommé à l'ordre national du mérite beaucoup plus tard, mais il la refusera, en accord avec ses convictions).
Par chance, (sinon je pense que je ne serais pas là), la formation ayant une durée de 2 ans, il la termine en mai 1945, c'est la fin de la guerre.

Rentré à Oran, ville de sa naissance (et de la mienne ainsi que celle de ma mère et de mes soeurs), il reste réserviste dans l'armée française, sur P47, MS Vanneau et T6, mais c'est la guerre d'Algérie. Lors d'un vol on lui ordonne de mitrailler un vieux fellah sur son âne, il tire à côté et se retire de l'armée.

Il devient alors chef du centre de vol à voile de Canastel près d'Oran, où j'apparais, après ma soeur qui sera suivi par une autre soeur et un frère (frère qui termine sa carrière sur Airbus actuellement). Nous vivons sur l'aérodrome en pleine campagne avec toute l'activité de l'époque sur les terrains d'aviation : c'est l'époque de l'Aviation Populaire, fortement encouragée par l'Etat.

En 1958, en pleine sale guerre d'Algérie, mes parents soutiennent l'indépendance. Pour cela ils sont inquiétés et menacés de mort par l'OAS. Ils veulent rentrer un soir dans leur appartement, mais les parachutistes français sont là. Le FLN Algérien les extirpent des menaces en nous envoyant tous à Rabat en train, abandonnant le peu d'affaires qu'ils avaient à l'époque. A Rabat une personne nous accueille, nous dépose dans un appartement vide, revient avec des matelas et des affaires de cuisine, et trouve du travail à mon père pour le traitement agricole (épandage) et traitement des criquets (lutte anti acridienne).
Nous habiterons ensuite à Fès, Ifrane, Casablanca et Rabat, toujours sur les petits terrains d'aviation, ou mon père devenait Chef des centres de vol à voile. Puis Agadir au 5eme étage d'un immeuble où, par chance lors du tremblement de terre, mon père est absent ayant été appelé pour un vol. Ma mère, effrayé à juste titre par les prémisses du seisme nous a habillé dans la rue, on a pris le car pour Casa. La ville s'écroulait derrière nous.
Une enfance dans les planeurs C800 accroupi derrière, dans les Stampes en accro, jouant dans les vieux avions abandonnés dans les hangars. Jusqu'en 1963 où nous retournerons en Algérie, après une rapide tentative d'installation en France à St Dizier, encore en habitant sur l'aérodrome. Mais le climat ne les enthousiasme pas vraiment, et nous retournons en Algérie.

En Algérie mon père tente de relancer l'aviation générale, nous vivons toujours sur les aérodromes, et toujours dans les avions : Dragon Rapide, Jodel, Stampe, Morane 315, Tiger Moth, Nord Ecrin, etc Ca n'intéresse pas trop les Algériens : le pouvoir en Algérie commence à être tenu par les militaires, et ils voient l'aviation comme exclusivement militaire ou monopole d'état. L'aviation générale ne prend donc pas.

Mon père devient alors pilote du président Ben Bella, sur Beech 18 modifié avec roulette de nez, jusqu'au coup d'état de Boumedienne.
Il pilote alors ensuite un Beech Baron que nous ramenons neuf depuis Le Bourget à Alger en famille, et vole alors pour une société de construction routière, la SACERAL. Nous habitons alors dans un immeuble dans le sable à Béchar (Colomb Bechar à l'époque), pas très longtemps.
Nous habitons ensuite à Alger Blanche (Dar El Beîda aujourd'hui), juste à côté de l'aéroport d'Alger, mais mon père est basé à 400 Km à Bejaia (Bougie à l'époque) pour Afric Air qui fait du transport à la demande vers les sites pétroliers dans le Sud. Je l'y accompagne souvent. Nous le rejoignons tous les Week Ends en voiture VW Variant, ma mère aimant conduire, de nuit sur les petites routes de l'époque, avec des matelas où nous enfants nous dormons à l'arrière pendant le long trajet : nous partons tous les jeudis en fin d'après-midi pour revenir le lundi. Inutile de préciser que j'ai redoublé mon CM2 cette année là.
Bougie, un aéroport abandonné sur lequel est basé l'Aztec que mon père pilote, habitant la caravane garée dans un hangar, qu'il a construite de ses mains lorsque nous étions à Fès au Maroc.

Enfants nous étions totalement libres sur cet aérodrome, campants à moitié, tour de contrôle envahie par les oiseaux. De très bons souvenirs. Ce sont les premières fois que mon père me passait les commandes en me mettant à gauche, me montrant comment on coupait et redémarrait un moteur en vol quand je rentrais avec lui sur Alger ou que nous partions dans le Sud sur des pistes aménagées et recouvertes par ces structures métalliques trouées des pistes de la seconde guerre mondiale.
Ca a duré un temps, mais devant les difficultés mon père a candidaté à Air Algérie, où il finira sur Convair, DC4, Caravelle et finalement sur Boeing 727.
Nous partons nous installer dans un immeuble à Marseille pendant 6 mois, mais ma mère ne s'y fait pas, et nous retournons à Alger. C'était nettement moins intéressant, la vie était devenue un peu plus fade avec la ligne. Nous habitions dans un immeuble dans le centre d'Alger, après quelques péripéties dans les diverses habitations (dont une grande villa au bord de la mer à Alger Plage, que les militaires réquisitionneront brutalement avec armes, en déposant toutes nos affaires dans la rue). Il a fallu partir évidemment. Dans cette maison il fallait, de retour du lycée en 6eme que je parte avec mon père qui adorait la pêche, le soir sur une petite barque, souvent dans le froid, et je déteste la pêche.
30 déménagements en 20 ans.

La formation sur planeur avant guerre :
Il n'existait pas de double commandes, donc la formation était toute théorique. Un planeur prototype était posé sur une poutre face au vent, le pilote s'entrainait à garder les ailes horizontales. Puis venait le premier lâcher, vol à quelques mètres du sol et posé droit devant. La difficulté venait ensuite pour le premier virage, tout théorique, avec quelques casses, quelques blessés ou quelques morts.

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Le décollage à Djebel Diss était vraiment particulier ! Il fallait à chaque fois remonter le planeur là-haut qui se reposait en bas.

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Djebel Diss

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Ma mère à l'extrême gauche sur la photo, toujours très active sur les terrains.
L'analyse du baromètre enregistreur emporté à bord, qui prouvait l'altitude atteinte (4eme photo).

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et encore ma mère et sa traction et qui soutient l'aile du planeur en courant, et la récupération d'un planeur après un vachage

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Posé au milieu des dromadaires

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Djebel Diss encore et Djebel Oum-Settas

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Formation pilote de chasse aux US d'avril 1943 à avril 1945

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P47, PT17, P40 et chambrée aux USA, Craig Field

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P47 aux USA et aux couleurs Françaises au dessus d'Oran

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P47 aux couleurs Françaises à Oran

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Vanneau posé sur le ventre par mon père suite rupture du vilebrequin, et en vols dans la région d'Oran

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Canastel (Oran), mon père au premier plan sortant le planeur C800, puis ma mère et mon père au centre, vue aérienne de Canastel avec Oran dans le fond. Ma mère y tenait le bar de l'aéro-club

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Canastel : Stampe, C800, Emouchet, le treuil et Aile volante Fauvel

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Canastel : Emouchets, Aile volante et Stampe, un hélico de l'armée qui passe par là

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Maroc, Fès. Nous habitons à la sortie de la ville sur l'aérodrome où nous y avons une liberté presque totale. J'admirais les circonvolutions acrobatiques de mon père dans le Stampe à faire des vrilles, des chandelles et des tonneaux lents, toutes sortent d'acrobaties le soir avant la fin du jour, et aussi descendant lentement à bord d'un planeur à la verticale du terrain en beaux, gracieux et silencieux loopings jusque très près du sol. Ce n'était pas de la voltige brutale comme aujourd'hui, très disgracieuse je trouve.
Moi et ma petite soeur Françoise.
Survol d'Ifrane dans l'Atlas Marocain.
Dans l'avion de la dernière photo dans le hangar, nous passions enfants des heures à faire des vols imaginaires.

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Les prémisses de ma vie future de pilote, ma mère et mon père avec nous enfants

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Fès au Maroc, fabrication de la caravane en contreplaqué aviation. Sur la deuxième photo, à droite le gardien de l'aérodrome que nous allions enfants regarder faire sa prière le soir après manger.

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Meeting aérien à Fès

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Fès où j'ai appris à faire du vélo. Mon père tient un bâton, pas un fusil !

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Ifrane et Bim le petit âne qui ne voulait pas qu'on lui monte dessus. Ma mère était revenue du marché de Fès sur une cariole tiré par cet âne, et avait acheté cet âne qui était resté là. Survol du hangar d'Ifrane.

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Epandage Maroc

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Saint Dizier, mon père et ma mère dans le Stampe. Ils partaient ensemble faire de la voltige que nous regardions d'en bas, jusqu'au jour où ma mère a pris peur et n'est plus jamais remonté.

[ago266 (Barnstormer)]

Magnifiques photos ! toute une époque .

[Emikoussi]

Comme tu dis : toute une époque !